8.3 Consommation médiatique et maladies cancéreuses

L’utilisation des divers dispositifs électroniques repose sur plusieurs systèmes de transmission: téléphonie mobile, Bluetooth ou réseau local sans fil. Selon le dispositif et l’utilisation qui en est faite, différentes parties du corps sont exposées à des rayonnements électromagnétiques de haute fréquence. Lorsque l’on passe un appel sur un téléphone portable, ce sont notamment la tête, l’oreille et la main qui sont particulièrement exposées. En outre, les courants électriques des composants électroniques et de la batterie ou de l’alimentation électrique des dispositifs génèrent des champs électromagnétiques de basse fréquence pénétrant également dans la tête ou dans la main (Office fédéral de la santé publique [OFSP], 2019). La médecine soupçonne le rayonnement des champs électromagnétiques de basse et de haute fréquence d’être cancérogène. Ainsi, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale de la santé a classé ces deux types de rayonnement dans la catégorie des agents pouvant être cancérogènes pour l’homme (groupe 2b) (IARC Working Group, 2013).

     L’individu qui commence à employer des téléphones portables, des tablettes et des ordinateurs dès l’enfance présente une plus longue durée d’utilisation et, par conséquent, une plus longue exposition cumulée au rayonnement que celui qui n’a commencé à les employer qu’à un stade ultérieur. En outre, les enfants sont jugés particulièrement vulnérables aux atteintes potentielles à la santé attribuables aux ondes électromagnétiques, du fait que leur système nerveux est encore en plein développement. Si le système nerveux anatomique est entièrement formé aux alentours des deux ans, son développement fonctionnel se poursuit jusqu’à l’âge adulte et pourrait donc être perturbé par les ondes électromagnétiques (Commission européenne, 2009).

     Pour les enfants et les adolescents, les chercheurs ont analysé en particulier la corrélation entre l’exposition aux ondes électromagnétiques et l’incidence des cancers du sang, comme la leucémie, et des tumeurs cérébrales. S’agissant de la leucémie, plusieurs études scientifiques ont établi que les enfants et adolescents soumis au rayonnement électromagnétique de basse fréquence couraient un risque accru (European Commission & Directorate General for Health & Consumers, 2015; Kheifets et al., 2010; Schüz, 2011), risque qui augmente en fonction de l’exposition (Kheifets et al., 2010). La corrélation qui se dégage du résultat de ces études est toutefois faible.

     En ce qui concerne les tumeurs cérébrales, diverses études concluent que les enfants et les adolescents faisant une utilisation normale des téléphones mobiles ne présentent pas de risque accru (Aydin et al., 2011; Kheifets et al., 2010; Schüz, 2011). De même, les enfants et les adolescents qui ont commencé à utiliser régulièrement un téléphone portable au moins cinq ans avant la date de l’enquête ne présentent pas non plus un risque plus élevé que ceux qui n’en emploient pas régulièrement. Aucune corrélation n’a par ailleurs été établie entre la localisation de la tumeur et la partie soumise au rayonnement le plus intense (Aydin et al., 2011). Une étude a toutefois abouti à la conclusion que l’incidence des tumeurs cérébrales était corrélée avec le temps écoulé depuis la souscription d’un abonnement de téléphonie mobile, mais pas avec l’intensité de l’utilisation. Ses auteurs signalent que le rayonnement électromagnétique constitue donc pour les enfants et les adolescents un risque de tumeurs cérébrales plus élevé que pour les adultes, du fait que le cerveau n’a pas terminé de se développer, que les os du crâne sont plus minces et que la densité tissulaire est différente (Gandhi et al., 2012; Hardell, 2017).

     En conclusion, les études réalisées jusqu’à présent ne permettent pas de se prononcer avec certitude sur le lien entre maladies cancéreuses et utilisation de médias numériques. En effet, leurs résultats sont contradictoires, elles sont difficilement comparables et souffrent de problèmes méthodologiques (en particulier l'impossibilité de transposer tels quels les résultats des expériences réalisées sur des animaux aux êtres humains et complexité des diverses sources de rayonnement possibles). Surtout, nous manquons d’études sur l’effet à long terme de la téléphonie mobile. Pour l’heure, nous disposons de données probantes faisant état d’une corrélation plutôt faible entre rayonnement électromagnétique et tumeurs cérébrales, cette corrélation étant un peu plus forte, mais toujours minime, dans le cas de la leucémie.

La médecine soupçonne le rayonnement des champs électromagnétiques d’être cancérogène. Il n’est pas possible de se prononcer avec certitude à ce sujet, car les études menées aboutissent à des résultats contradictoires, présentent des problèmes méthodologiques, sont difficilement comparables entre elles et on manque d'études à long terme.